Frédéric Chopin et George Sand, accompagnée de ses deux enfants, ont vécu à Valldemossa pendant l’hiver 1838. Face à l’attitude des habitants, leur isolement a nourri des œuvres majeures – Ève Scholtès
Ils doivent partir. Le couple cherche un refuge pour soigner la tuberculose de Frédéric Chopin d’une part et pour réanimer le génie littéraire de l’écrivaine d’autre part. George Sand pense aux Baléares en Méditerranée, particulièrement à Majorque, dont elle a déjà foulé le sol en compagnie de Musset quelques années plus tôt.
L’île est la plus vaste de l’archipel catalan. À l’instar de ses sœurs (Minorque, Ibiza et l’île de Cabrera), Majorque bénéficie d’une météo clémente : chaleur agréable et ensoleillement 300 jours par an, le climat idéal pour combattre la tuberculose de Frédéric Chopin. L’envie d’un isolement créatif, propice à l’écriture de George Sand, devrait trouver matière à satisfaction.
Le couple arrive en ordre dispersé. Leurs routes se rejoignent à Palma, la capitale. La tribu prend la route de Valldemossa, un village niché au cœur de la serra de Tramuntana. Elle croise des cultures d’orangers, de caroubiers et d’amandiers, des constructions d’origine arabe ou de facture gothique catalane. George Sand et les siens posent bagages, instrument et imaginaire dans un ancien palais transformé en couvent : une chartreuse du XIVe siècle (1). Les Français sont enchantés par leur rencontre, les habitants moins : le courant ne passe pas. Le couple SandChopin ne fréquente pas l’église et vit dans un lieu sacré sans être marié. George Sand fumerait des cigarettes et porterait un pantalon. Tout cela ajouté au caractère contagieux de la maladie du compositeur. Le séjour accouche toutefois de chefs-d’œuvre : « Un hiver à Majorque » pour Sand, l’achèvement de la série des Préludes, notamment, pour Chopin.