Petit pays aux grands espaces – c’est le moindre de ses paradoxes -, Panama compte seize parcs nationaux dont celui du volcan Barú, qui culmine à 3475 m. Dans l’un de ses deux plus anciens territoires naturels protégés, l’ascension du plus haut sommet du pays, à travers la jungle tropicale, requiert seulement d’être en bonne santé (1). Mais l’écotourisme qui se développe à petite échelle dans le secteur montagneux du Chiriqui, aux confins du Costa Rica, a d’autres facettes.
A Cerro Punta, où l’altitude (2000 m) rend le climat très agréable en toute saison, le centre d’hébergement Los Quetzales, du nom d’un oiseau rare qui prête aussi ses longues plumes vertes à un dieu-serpent mexicain, est le point de chute d’ornithologues nord-américains passionnés.
L’accueil en chambres individuelles dites « écolodges » ou « cabins » est rustique mais chaleureux, rappelant ce qu’il était dans notre hôtellerie de montagne des années 1960.
Le breakfast avalé à la table commune, nos écotouristes tiennent de longs conciliabules, confrontant leurs guides et planches à dessin, avant de grimper à bord de 4X4 japonais qui les déposent à l’orée du parc national. La rando à cheval ou à VTT en distraient d’autres, à travers des paysages escarpés où les cultures vivrières en terrasses ne laissent pas un centimètre carré sans oignons, carottes ou patates.
Aux 972 variétés d’oiseaux (2) dont le fascinant colibri au vol stationnaire, s’ajoute la palette d’une flore prodigieuse. 2000 plantes sont répertoriées au Panama, ce qui en termes de biodiversité surpasse les Etats-Unis et le Canada réunis.
Des accompagnateurs bilingues (espagnol-anglais) comme Carlos justifient leurs tarifs (3) en véhiculant et guidant les touristes ordinaires, leur révélant les noms de merveilles, telle l’héliconia et son bec de perroquet. La forêt du parc du volcan Barú abrite des pumas, ocelots, tapirs, toucans et autres agoutis (rongeur) que le visiteur, soyons honnêtes, observe rarement.
Singes et peuples de la rivière
En revanche, c’est bien le diable si, remontant le rio Chagrès, dans le parc national du même nom, à bord d’une pirogue dirigée par un Indien Embera, vous ne voyez pas quelque singe surgir, facétieux, de la dense canopée dans un bruissement de branchages. Hurleur, capucin, titi, singe araignée… une dizaine de petits primates font de Panama, là encore, le pays le plus diversifié d’Amérique centrale en la matière.
C’est sur les rives du Chagrès, jadis infestées de caïmans (lopoga), que se rencontre la communauté indigène Embera Quera. Originaires de la Colombie voisine, d’où elles ont fui les exactions des FARC (4), une douzaine de familles, soit une quarantaine de personnes toutes très jeunes – le chef de la tribu à 27 ans – vivent depuis 2007 sur neuf hectares qu’elles ont achetés tout en acquérant la nationalité panaméenne.
Leur « danse de bienvenue » peut paraître un peu trop…convenue. Mais, dans une forme encore diffuse, le tourisme leur permet d’écouler des articles artisanaux (bracelets, masques, pendentifs, vêtements traditionnels) de très belle facture, vendus sur la base d’un dollar par journée de travail.
Ainsi les Embera Quera revendiquent-ils le droit de vivre dans le dénuement de leurs ancêtres. Dans leur langue, amérindienne, Panama signifie pourtant « abondance ».
(1) 4 à 5 heures de marche
(2) Selon George R. Angehr, auteur d’un répertoire des oiseaux de Panama
(3) 115 euros la journée pour l’accompagnement de deux à quatre personnes
(4) Forces armées révolutionnaires de Colombie