Vu d’ailleurs, longtemps tout s’est résumé à ce slogan : « Made in Taïwan ». Premier des quatre dragons asiatiques à s’être approprié la croissance technologique, c’est peu dire que l’étiquette colle à cette île que beaucoup imaginent n’être qu’une ville-usine. Si Taipei – sa capitale – repousse en effet loin ses faubourgs, le petit État subtropical n’en reste pas moins long de 370 kilomètres gorgés de rivières, forêts et montagnes. Découverte par les Portugais avant d’être successivement mise sous le joug des Hollandais, de la Chine et du Japon, l’ancienne Formose (« belle île ») aura pourtant su tisser sa propre identité à toutes les sauces asiatiques. Qu’importe si la Chine considère toujours l’île comme l’une des pièces manquantes à son puzzle, les 24 millions de Taïwanais clament chaque saison plus fort leur indépendance. Rien de mieux pour s’en persuader que d’aller en pèlerinage au mémorial Tchang Kaï-chek, symbole à lui seul de la complexité géopolitique du pays. En 1949, contraint à l’exil après sa défaite face aux communistes, le leader nationaliste s’était réfugié à Taïwan avec quelque 2 millions de compatriotes. Dans leurs valises, autant de ressentiment que de trésors culturels et culinaires cachés. Taïwan étant au passage devenue la capitale asiatique de la « street food », le détour par l’un de ses exaltants marchés de nuit reste à ce titre fortement conseillé. Toute aussi appétissante car riche de 650 000 pièces pour la plupart exfiltrées de la Cité interdite de Beijing, la collection du musée national du Palais est aussi deux fois plus importante que celle du Louvre. Du haut de ces vitrines, 50 siècles vous contemplent.
À l’autre bout de la frise chronologique, Taipei l’ultraconnectée. À l’ombre de sa tour 101, un cortège de scooters et de vélos – en libre-service – disciplinés (les Taïwanais insistent sur ce trait les distinguant de leurs frères ennemis chinois), bars et restos branchés, boutiques internationalisées ou bien miraculeusement héritées du passé. Si la capitale suffit à étancher toute soif d’exotisme, quitte à voler douze heures depuis Paris, autant fractionner le séjour avec une virée dans le centre ou le sud de l’île. Avec son bec de canard, le TGV local vous transportera en un rien de temps vers l’ancienne capitale Tainan. Plus bas, direction le comté de Pingtung et ses villages aborigènes nichés dans cette montagne où s’agite le macaque endémique de Formose. Aux amoureux des vieilles pierres spirituelles, signalons enfin que l’île abrite plus de 5 000 temples et monastères.
Impossible de ne pas avoir les yeux plus gros que le ventre. Accordons à Taïwan le titre de destination la plus appétissante de l’Est asiatique. À force de colonisations, d’exils ou de métissages, l’île s’est positionnée au carrefour des influences régionales en général, chinoises en particulier. Une vie entière de gourmet ne suffirait pas à tout goûter, tant viandes, poissons, fruits et légumes s’y déclinent à l’infini. Au choix, une cuisine violemment pimentée en souvenir de Sichuan, doucement cuite à la vapeur à la mémoire de Canton, tendrement braisée à la sauce aborigène, chaudement frite en bord de mer, fondante comme le furent les fondues de la cour impériale… À seulement 180 kilomètres de leur Chine originelle, le plaisir d’accommoder les restes de cet héritage culinaire est une évidence commune à tous les Taïwanais. Mais, s’il ne fallait retenir qu’une adresse, ce serait celle des centaines de marchés de nuit. À l’image de celui de Shilin, à Taipei. Sitôt la nuit tombée, c’est un alléchant bordel organisé d’échoppes en échoppes qui s’empare du quartier. Pêle-mêle, citons d’abord une marée de coquillages (les huîtres ont parfois la taille d’une main de bûcheron) et de crustacés ; le pays comptant quelque 200 ports de pêche.
Entre terre et mer, le cœur et l’estomac balancent aussi, à condition d’avoir les deux bien accrochés. Comme devant le très populaire tofu pourri, officiellement fermenté jusqu’à devenir puant. À peine plus conventionnels aux yeux du lointain visiteur, citons ensuite « l’œuf de fer », aussi foncé que caoutchouteux, des tonnes de langues de canards grillés, le pain-cercueil, l’intestin de porc à la mode Hakka, ou bien ces steaks nappés de sauce au chocolat. Au-delà de ce que l’impétrant peut qualifier d’extrême, il convient tout de même de souligner le raffinement des recettes taïwanaises. Au sous-sol de la tour 101, la cafétéria Din Tai Fung affiche ainsi, sans charme apparent, une étoile Michelin. Ce qui n’est en fait que juste récompense pour ses juteux raviolis façonnés en direct. Pour ceux qui ont le temps de quitter la capitale, deux adresses enfin. D’abord du côté de Tainan, à la table de l’inattendu resto-brocante Zhu Xin Ju, où l’on vous sert un surprenant poulet noir. Plus au sud, vous ressortirez médusé du marché aux poissons de Donggang. Au bord de la mer – sans touriste aucun –, poissons (littéralement frétillants) et fruits de mer y sont cuisinés sous vos yeux. On pourrait s’arrêter là, mais restent le traditionnel gâteau à l’ananas et le thé glacé aux perles de tapioca pour faire glisser tout ça.
Plus haute tour de la planète lors de son inauguration en 2004, la Tapei 101 (comme le nombre de ses étages) figure toujours dans le top 10. Un belvédère perché 509 mètres au-dessus du bitume, pour peu que les nuages ne vous gâchent pas la vue sur la ville et les montagnes environnantes. Suspendue entre le 87e et le 92e étage, une boule lourde de 660 tonnes sert de contrepoids en oscillant : fort heureusement taillé pour résister aux séismes menaçant la région, le mécanisme se visite. Le gratte-ciel dispose aussi des ascenseurs les plus rapides au monde.
Fondé en 1899, c’est le plus grand de Taipei. Immense déballage de tout ce que Taïwan produit comme jeux d’arcades, fringues tendance, gadgets technologiques et bien sûr créations culinaires.
À faire passer la relève de la garde de Buckingham pour une simple parade de majorettes. Ne manquez donc pas celle des soldats gardant l’impressionnant bâtiment de marbre blanc et la statue de bronze de l’ancien dictateur. À heure fixe, une véritable prouesse millimétrée où le maniement des armes confine au jonglage.
Météo À cheval sur le tropique du Cancer, l’île de Taïwan profite d’un climat subtropical au nord et tropical au sud, avec des étés très chauds et des hivers doux à chaud. La période idéale pour partir est d’octobre à mars, une fois la saison des typhons achevée.
Loin des centres commerciaux standardisés du quartier d’affaires, une ancienne fabrique de tabac superbement réhabilitée en village d’artistes et d’artisans se cache dans un parc. À l’intérieur du bâtiment des années 1930, qui abrite aussi un petit musée du Design, une chic enfilade de boutiques, cafés et ateliers.
5 000 ans de civilisation chinoise sous vos yeux. À flanc de colline, l’un des plus riches musées au monde. Peintures, calligraphies, jades, céramiques, bronzes, sculptures en bois, armes et mobilier des différentes dynasties.
Si le Festival des lanternes aura lieu à Taichung en 2020 (du 8 au 23 février), c’est dans la vallée de Pingxi que cette cérémonie prend tout son sens et sa magie. Au nord de Taipei, le petit village de Shifen voit chaque saison de nombreux jeunes amis ou amoureux lancer leur lanterne de papier dans le ciel après y avoir inscrit un vœu. Dans ce village traversé par une ligne de chemin de fer si désuète qu’on la croit à tort désaffectée, la foule se fend littéralement en deux au passage du train. Les fans de randonnée poursuivront jusqu’aux chutes de Shifen.
L’envie de partir peut vous saisir à tout moment, hiver comme été, sur un coup de tête. Au départ de Bordeaux, c’est un large éventail de destinations qui s’offrent à vous. Le temps d’un week-end d’une petite semaine.