Ce pays sans armée de 5 millions d’habitants a érigé en dogme la protection de la nature. Un tourisme raisonné qui est devenu la première richesse nationale
Un ciel traversé par plus de 900 oiseaux, du merle fauve au toucan en passant par le mythique quetzal, une forêt peuplée de singes, serpents, iguanes, mais aussi des centaines d’orchidées, des eaux océanes où s’ébattent des baleines à bosses, des rives fluviales où les crocodiles s’aiguisent les dents, et, sur la plage du parc national Manuel Antonio, entre baigneurs, chevaux et marchants de noix de coco, quelques … ratons-laveurs pas farouches.
Inventaire zoologique évidemment vague d’animaux croisés en quelques jours dans le Sud Ouest du Costa Rica. Depuis quarante ans, grâce à un président éclairé, Daniel Oduber Quiros, le même qui autorisa le parti communiste en 1975 et renoua avec Cuba en 1977 ce pays Poucet d’Amérique Centrale a, en effet, érigé la défense de la nature en dogme. Un quart des 50 000 km2 de son territoire est ainsi classé sous protection. Cela lui a permis de faire de son environnement protégé un trésor, à tel point que le tourisme raisonné est devenu une richesse nationale. Et sur le plan écologique, ce tout petit pays (0,06% des terres émergées) concentre 6% de la flore et de la faune de la planète !
La volonté politique affichée par les dirigeants costariciens est, sans conteste, la plus pacifique de la planète. Il y a soixante ans, après une guerre civile meurtrière, décision – unique au monde – fut prise, de supprimer l’armée et de consacrer l’argent ainsi économisé à l’éducation et à la culture. En 1987, le président de l’époque, Oscar Arias Sánchez reçut le prix Nobel pour avoir donné la paix à l’Amérique Centrale. Aujourd’hui, le Costa Rica fait figure de « Suisse » de la région.
L’oiseau de majesté
Les « Ticos » comme sont surnommés ses habitants semblent évoluer dans un climat apaisé, avec pour se saluer en toutes occasions une apostrophe prometteuse à laquelle on n’échappe pas : « Pura vida! » (« pure vie! »). Elle est mise à toutes les sauces, jusque sur les t-shirts et résume bien la tranquille ambiance locale. Signe de (relatif bien être social), la quasi absence de fumeurs malgré un prix du paquet des cigarettes cinq à six fois moindre qu’en Europe. En témoigne aussi le sort fait aux animaux aussi choyés les uns que les autres, les sauvages ultra protégés, les domestiques plus victimes de caresses que de coups de bâton. Enfin, comme pour ajouter à cette harmonie ambiante, la cuisine locale est extraordinairement douce, sans épices qui emportent la gueule, à la limite de la fadeur. L’inévitable petit déjeuner local est fait de riz aux haricots : le gallo pinto, qu’une inexplicable subtilité de prononciation transforme en « gadjo pinto ».
Le sud ouest costaricien se caractérise par un climat très tropical. Autant dire qu’il y fait très chaud, qu’il y pleut beaucoup. Encore que la géographie réserve quelques surprises. Deux jours à San Gerardo de Dota, dans la sublime cordillère où se trouve le parc national » Los Quetzales » nous ont fait comprendre que le surnom donné à la région, – « montagnes nuageuses » – frisait l’euphémisme. On n’ose imaginer les scores de pluviométrie enregistrés dans ces forêts où règne le quetzal, l’oiseau de majesté qui a donné naissance à la légende du serpent à plumes. Après une nuit en chalet avec chauffage, bouillotte et triple couche d’édredons, il y a de la posture poétique à l’idée de rejoindre le guide, avant six heures du matin pour chercher sur ses pas, et sous un parapluie, l’arbre à avocats dont le gourmet volatile se délecte.
S’approcher des baleines
Sur la côte, quelques dizaines de kilomètres plus au sud ouest, ce sont les baleines, heureusement inaccessibles à ceux qui continuent de les chasser, qui paradent dans les eaux chaudes du Pacifique. Il faut un peu de chance, et beaucoup de l’habileté du capitaine pour s’approcher sans les effrayer de ces monstres.
Mais quand l’un d’entre eux bondit hors de l’eau, c’est une masse de 40 tonnes bon poids, – presque le plus gros animal de l’univers – qui, à cinquante mètres nargue regards et objectifs. Si la bête y prend goût, alors qu’elle pourrait d’un coup d’aileron renverser l’esquif, elle paradera encore une fois, deux fois, trois fois, comme pour aspirer quelques goulées de soleil et retrouver son paradis des profondeurs.
Rafting, cavalcades et spots de surf
Les noms sont évocateurs : « Come Gringos » (« Dévoreur de Gringos ») ; « Boca del Diable » (« Bouche du Diable »). Des rapides de quatrième catégorie. Autrement dit constitués de vagues d’un bon mètre de haut qui submergent les embarcations, trempent jusqu’aux os les pagayeurs et, le cas échéant, en arrachent un ou deux qui sont contraints à un mémorable bain dans une eau chaude. La rivière Saveguere fait partie des spots de rafting immanquables au Costa Rica. Deux heures de descente au milieu de paysage du jardin d’Eden, tantôt frôlant la forêt, tantôt des plantations de bananiers, de café, avec halte au pied d’une immense cascade d’eau… tiède. Privilège de la situation géographique, on ne risque pas le rhume sous le soleil brûlant d’entre tropique et équateur. On considèrera même l’arrosage intégral que réserve la rivière comme un intermède rafraîchissant. Après les consignes de sécurité, la virée que nous avons effectuée reste un très bon souvenir. Au fil de la balade, nous avons vu tomber à l’eau quatre occupants des trois autres bateaux de l’expédition, nous avons récupéré un kayakiste et son esquif, une rame, une chaussure, et malgré notre amateurisme, sommes sortis sans bain forcé. Nous le devons à Eduardo, notre capitaine, qui connaît les rapides comme sa poche et qui a manœuvré comme à la parade son équipage de quatre moussaillons: deux coups de rame à gauche, trois coups de rame à droite, en arrière toute … Il a suffi de souquer quand il fallait. Formidable expérience.
Cascades inaccessibles
Pour goûter à l’eau, il y a aussi le cheval. Accompagné d’un Savanero – le cow-boy local – d’anthologie, sosie de Lee van Cleef dans le Bon la Brute et le Truand, nous avons clapoté sur le dos d’un paisible équidé dans une rivière jusqu’à – manie – une cascade inaccessible au bord de laquelle viennent parfois boire des jaguars peureux.
Moins facétieux, les Oussama, Shakira et consorts, monstrueux crocodiles qui peuvent atteindre les six mètres de long et que de courageux bateliers montrent aux touristes et titillent avec leurs réserves de cuisses de poulet. Les sauriens sont des dizaines tantôt sommeillant tantôt bien éveillés qui viennent frotter leur monstrueux museau jusque sur les flancs du bateau.
Et puis il y a les baleines. Au choix, la baleinière, recommandée aux cœurs bien accrochés : la vague de la plage à franchir puis, quatre heures de tangage garantis, ou le catamaran, moins cher (69 dollars contre 85) bien plus calme et apaisé avec bar à volonté, possibilité de bain de soleil sur le pont et arrêt dans une anse pour plongée.
Dernier atout aquatique, outre évidemment, la baignade, le surf avec quelques spots mémorables break et beach break droites et droites/gauches sur les plages de Manuel Antonio et de Quepos que nous avons visitées. Voilà qui change des crocos. Et une des plus belles vagues gauches du monde, à Puerto Viejo, sur la Côte Caraïbe.
Y aller : De Bordeaux vers San José, vols par Iberia via Madrid.
Climat : saison sèche, de décembre à avril.
Monnaie : le colon : 30000 valent 50 euros. Le dollar est accepté partout, nombre de prix sont directement libellés dans la monnaie de l’Oncle Sam et les distributeurs de billets proposent le choix entre les devises locale et américaine.
Décalage horaire : en été, – 8 heures par rapport à la France, en hiver, – 7 heures.
Alimentation : exception en Amérique Centrale pas de précautions particulières. Sauf indication contraire, dans les villes et en montagne, l’eau du robinet est partout potable.
Wifi : on en trouve quasiment partout et gratuit.
Guide : Nous avons été pilotés par un des rares spécialistes francophones locaux : le chaleureux Marco Paris, botaniste, ornithologue, passionné par son pays, capable d’effectuer un demi tour sur la Panaméricaine pour montrer dans sa lunette un couple d’aras sur une branche. mparisv@yahoo.com. Tél (506) 89 37 70 70
Pourboires : plus que conseillés dans les hôtels bars et restaurants
Renseignements : www.visitcostarica.com